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Comment la fusion des entreprises est-elle réglementée en Europe ?
17 octobre 2023
Comprendre le cadre juridique de la fusion des entreprises en Europe
En Europe, la fusion des entreprises est régie par une variété de réglementations ayant pour objectif de protéger les intérêts des actionnaires, des employés et d'autres parties prenantes, tout en préservant la concurrence équitable sur le marché. Diverses entités comme l'Union européenne (UE), les gouvernements nationaux et les autorités de régulation du marché sont chargées d'établir ces réglementations et de les mettre en application.
- Au niveau de l'Union européenne, les fusions d'entreprises sont principalement soumises au règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20 janvier 2004, qui a instauré un contrôle des concentrations entre entreprises. Le but est de prévenir et de dissuader les fusions qui pourraient significativement entraver une concurrence effective dans l'Espace économique européen (EEE) ou dans une partie substantielle de celui-ci. Le règlement prévoit un processus d'examen approfondi des fusions proposées, pouvant aboutir à leur interdiction si elles sont considérées comme anticoncurrentielles.
- Les entreprises impliquées dans une fusion doivent également se conformer à la Directive 2005/56/CE du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 sur les fusions transfrontalières des sociétés de capitaux. Cette dernière a pour but de faciliter la restructuration d'entreprises opérant dans plusieurs États membres, en harmonisant les réglementations nationales sur les fusions transfrontalières. Par exemple, elle impose aux entreprises de préparer un projet de fusion détaillé et d'obtenir l'approbation des actionnaires avant de pouvoir procéder à une fusion.
- Il est important de noter que les fusions d'entreprises en Europe peuvent également être soumises à d'autres réglementations, comme les lois sur la protection des données ou sur le droit du travail, qui peuvent avoir une incidence significative sur le processus de fusion. Par conséquent, les entreprises envisageant une fusion doivent bien comprendre le cadre juridique complexe dans lequel elles opèrent et chercher des conseils juridiques appropriés.
- Au niveau national, les réglementations sur les fusions varient selon les pays, mais elles tendent généralement à suivre les principes établis par l'UE. Ainsi, elles peuvent exiger que les entreprises notifient les autorités de régulation du marché de leurs projets de fusion, qu'elles fournissent des informations détaillées sur l'opération envisagée et qu'elles respectent certaines procédures pour protéger les droits des actionnaires et des employés.
Les étapes clés du processus de fusion selon le droit européen
Le droit européen a défini un processus rigoureux en matière de fusion des entreprises en Europe. Celui-ci est constitué de plusieurs étapes clés dont chacune a ses propres exigences réglementaires.
- La première étape est l'élaboration d'un projet de fusion : les directions des entreprises impliquées doivent préparer un rapport détaillé sur les modalités et les objectifs de ladite fusion. Ce projet doit inclure des informations détaillées sur la forme juridique, la raison sociale et le siège des sociétés impliquées, ainsi que sur l'échange des droits des associés ou des actionnaires. Il doit aussi préciser les modalités de l'évaluation des actifs et des passifs qui seront transférés à la société absorbante.
- Il s'agit ensuite d'obtenir l'approbation des actionnaires. Toutes les personnes concernées doivent, en effet, approuver ce projet de fusion. Bien que cela puisse varier en fonction des règles nationales, une majorité qualifiée de deux tiers des voix exprimées est en général nécessaire.
- La troisième étape de ce processus est la vérification par un expert indépendant, nommé par un tribunal ou une autre autorité compétente et chargé de confirmer que l'évaluation des actifs et des passifs est correcte et que l'échange des droits des associés ou des actionnaires est équitable.
- Puis il faut obtenir l'approbation des autorités de régulation sachant qu'en fonction des secteurs d'activité des entreprises fusionnantes, différentes autorités peuvent être impliquées. Ainsi, si la fusion a un impact sur la concurrence, elle doit être approuvée par la Commission européenne ou l'autorité nationale de la concurrence.
- La dernière étape, enfin, consiste dans l'enregistrement de la fusion. Une fois toutes les approbations obtenues, celle-ci doit être enregistrée auprès du registre du commerce. Dès lors, après enregistrement, la fusion est effective et la société absorbante prend en charge tous les droits et obligations des sociétés concernées.
Notez toutefois que ce processus peut varier en fonction du type de fusion et des législations nationales. Il est donc toujours préférable de consulter un conseiller juridique lors de la planification d'une fusion.
Rôle et implication de la Commission européenne dans les fusions d'entreprises
En tant qu'organe exécutif de l'UE, la Commission européenne est chargée de faire appliquer les règlementations et les directives européennes, y compris celles qui régissent les fusions et les acquisitions d'entreprises. Elle joue donc un rôle déterminant dans le processus de fusion d'entreprises en Europe. Son rôle principal, dans ce contexte, est de veiller à ce que la concurrence ne soit pas entravée et que le marché unique de l'UE reste ouvert et compétitif.
Dans ce but, la Commission européenne examine chaque fusion ou acquisition ayant une dimension européenne, en se basant sur le règlement de l'UE sur les concentrations pour déterminer si une opération doit lui être notifiée. Une fusion doit en général être notifiée si elle dépasse certains seuils en termes de chiffre d'affaires combiné des entreprises concernées. L'objectif est de permettre à la Commission d'examiner l'opération avant qu'elle ne soit mise en œuvre.
Après notification d'une fusion, la Commission entre dans une phase d'examen approfondi et évalue les effets potentiels de la fusion sur la concurrence dans le marché unique de l'UE. Elle peut décider de s'y opposer si elle conclut que la fusion pourrait entraver de manière significative une concurrence effective. Notez qu'elle peut aussi imposer des conditions et des obligations aux entreprises qui fusionnent pour éviter les problèmes de concurrence. Ces mesures correctives peuvent prendre diverses formes, telles que la vente d'une partie de l'entreprise à un concurrent ou des engagements de non-discrimination dans l'accès à certains marchés ou services.
Il faut savoir, enfin, que les décisions de la Commission sont susceptibles de recours devant les tribunaux de l'UE. Les entreprises ont donc la possibilité de contester les décisions de la Commission si elles estiment qu'elles sont injustifiées ou basées sur une mauvaise interprétation du droit de l'UE.
Pour conclure, la Commission européenne assure un équilibre entre les intérêts des entreprises désireuses de fusionner et la nécessité de préserver une concurrence saine sur le marché unique européen : ce rôle est crucial.
Les critères d'évaluation d'une fusion d'entreprises en Europe
La fusion d'entreprises en Europe est un processus complexe devant se conformer à un ensemble de réglementations strictes, parmi lesquelles il existe des critères d'évaluation spécifiques utilisés pour déterminer si une fusion est autorisée ou non. Ces critères sont principalement conçus pour protéger la concurrence, éviter une concentration excessive de pouvoir dans une seule entité et garantir que les consommateurs ne soient pas défavorisés par une fusion.
- Le premier critère d'évaluation d'une fusion d'entreprises en Europe est la définition du marché pertinent. Cela comprend l'identification des produits ou services concernés par la fusion et de leur zone géographique, dans le but de déterminer si la fusion pourrait créer ou renforcer une position dominante sur un marché précis. Cela pourrait, en effet, nuire à la concurrence.
- Un autre point essentiel consiste à évaluer l'impact de la fusion sur la concurrence : cela implique d'examiner si ce processus pourrait réduire la concurrence en éliminant un concurrent potentiel ou en créant des barrières à l'entrée sur le marché pour de nouveaux concurrents. Le niveau de concurrence restant après la fusion est également examiné.
- La Commission européenne (qui est l'autorité de réglementation des fusions en Europe) examine aussi l'impact potentiel de la fusion sur les consommateurs en procédant à l'analyse des effets possibles sur les prix, la qualité des produits ou services, le choix des consommateurs et l'innovation. Si la fusion risque d'avoir un impact négatif sur les consommateurs, elle peut être empêchée ou des conditions peuvent être imposées pour atténuer ces effets.
- Enfin, la Commission européenne tient compte de l'efficacité économique de la fusion, ce qui signifie qu'elle examine si la fusion peut entraîner des gains d'efficacité pouvant compenser tout impact négatif potentiel sur la concurrence. Pour cela, les entreprises doivent pouvoir démontrer que les gains sont vraiment efficaces, qu'ils ne peuvent pas être réalisés par d'autres moyens (moins restrictifs pour la concurrence) et qu'ils sont bénéfiques pour les consommateurs.
L'évaluation d'une fusion d'entreprises en Europe repose donc sur une série de critères complexes visant à protéger la concurrence et les consommateurs. Ainsi, les entreprises qui envisagent une fusion doivent se préparer à un examen approfondi de leur opération et veiller à ce qu'elle soit conforme à toutes les réglementations pertinentes.
Cas de fusion d'entreprises : exemples et analyses en contexte européen
La fusion d'entreprises est une stratégie d'expansion et de consolidation que de nombreuses entreprises utilisent pour augmenter leur part de marché, leur capitalisation boursière ou simplement pour améliorer leur position concurrentielle. C'est un phénomène courant dans le paysage économique européen. Cependant, les fusions sont soumises à réglementation, et chaque cas est soigneusement examiné par les autorités européennes compétentes.
La fusion entre Fiat Chrysler et le groupe PSA en 2020, par exemple, a créé le quatrième plus grand constructeur automobile du monde : Stellantis. Cependant, avant d'obtenir le feu vert, les deux entreprises ont dû passer sous le radar de la Commission européenne. Le principal problème soulevé par la cette dernière était la position dominante que le nouvel ensemble pourrait avoir sur le marché des véhicules utilitaires légers dans certains pays de l'UE. Pour répondre à ces inquiétudes et obtenir l'approbation de la fusion, Fiat Chrysler et PSA se sont engagés à renforcer la concurrence dans ce segment, en aidant les constructeurs de voitures électriques à entrer sur le marché.
Une autre fusion mémorable a été celle des géants de la bière Anheuser-Busch InBev et SABMiller en 2016, qui fut l'une des opérations les plus importantes de l'histoire. Mais celle-ci a également soulevé de nombreuses inquiétudes en termes de concurrence car, pour obtenir l'approbation de la Commission européenne, Anheuser-Busch InBev a dû accepter de vendre presque toutes les activités de SABMiller en Europe.
Ces deux cas montrent la manière dont la fusion d'entreprises est réglementée en Europe, l'objectif principal de la Commission européenne étant de garantir que ces procédés ne restreignent pas la concurrence sur le marché. Pour ce faire, elle peut exiger des entreprises qu'elles prennent des mesures pour faciliter l'entrée de nouveaux acteurs sur le marché, ou qu'elles cessent certaines activités.
Il convient malgré tout de noter que chaque fusion est unique et donc évaluée au cas par cas. Pour cela, les autorités considèrent la taille des entreprises concernées, leur part de marché, la nature de l'industrie et d'autres facteurs pertinents. De plus, la réglementation des fusions ne se limite pas à l'UE : dans de nombreux cas, les entreprises devront également obtenir l'approbation des autorités de la concurrence d'autres juridictions.
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